13 - 03
2008
-
Journée Japon au festival avec deux hommages et un film japonais le soir à 19h30,
ici, le Manga café du village Asia
"Beautiful" de Juhn Jaihong (Corée du sud)
/ compétition
sur la sène du CID, le jeune réalisateur Juhn Jaihong présente "Beautiful", son premier film
critique....
Premier film d'un réalisateur coréen Junh Jaihong, produit par Kim Ki-duk, on espérait beaucoup de "Beautiful" et l'essai est marqué : quelques lourdeurs vers la fin, trop c'est trop, pourra-t-on sans doute lire, car la fin est dérangeante, bouquet final plus pessimiste que l'ensemble du récit qui laissait un mince d'espoir, dérangeant l'ensemble du film d'ailleurs... J'ai noté quelques spectateurs au masculin qui sont sortis de la salle, les spectatrices, elles , sont restées...
Trop belle pour toi, pour eux, pour tout le monde, Eunyoung est la beauté incarnée, suscitant désir obsessif et jalousie. Le fiancé de sa meilleure amie, qui s’épuise à être jolie entre son coiffeur et son chirurgien esthétique, la drague, la harcèle de messages, mais c'est avec elle que l’amie de dix ans se fâche. Le gardien de l'immeuble est submergé de fleurs que lui envoient des admirateurs éperdus d’amour, Eunyoung s'en débarrasse, ainsi, un des envoyeurs de fleurs prend le prétexte qu'elle l'a humilié en trouvant son bouquet dans un sac poubelle, il finira par la violer chez elle en se faisant passer pour le releveur de compteurs d’électricité. Au commissariat, le lieutenant de police l'accuse de porter des minijupes, de provoquer les hommes et regarde les vidéos du voyeur violeur en boucle. On fait venir l’agresseur qui hurle qu'elle l'a violé, elle, Eunyoung, avec sa beauté, que le violeur, ce n'est pas lui mais elle!!!
Quand la jeune fille s’évanouit en sortant du commissariat, ça provoque une émeute, les hommes se disputent pour la raccompagner chez elle. Seul un jeune policier semble compatir et la respecter, il demande qu’elle soit examinée par un policier femme. Petit à petit, le jeune homme devient son ange gardien, malheureusement, il ne supportera ni son amour frustré ni le spectacle de l’autodestruction de Eunyoung pour échapper au désir des hommes qu’elle fuit désespérément depuis son agression.
Au début du film, Eunyoung rencontre une grosse caricaturale qui s’empiffre et dégoûte les passants, elle lui montre sa photo jeune et mince «avant», c’est l’antidote, la solution. Après le viol, Eunjoung va passer de la boulimie, engouffrant des kilos de hamburgers et lipides, à l’anorexie, s’épuisant à courir et se gavant de gelules amaigrissantes. Comme elle est devenue une clocharde qu’enfin plus personne ne remarque, pire, qu’on fuit, Eunyoung change de cap. C’est là où la démonstration est complexe et va gêner le plus le spectateur : le réalisateur veut montrer (sans doute) que la jeune fille meurtrie ne se contentera pas d’être repoussante, que les choses ne sont pas si simples… Car Eunjoung va entrer dans un conflit intérieur qui finira dans la folie, où elle veut à la fois séduire et ne pas séduire, retrouver sa beauté (outrée, elle se maquille comme une prostituée) tout en se débarrassant du désir des hommes et pourquoi pas carrément des hommes…
Quand la jeune fille s’évanouit en sortant du commissariat, ça provoque une émeute, les hommes se disputent pour la raccompagner chez elle. Seul un jeune policier semble compatir et la respecter, il demande qu’elle soit examinée par un policier femme. Petit à petit, le jeune homme devient son ange gardien, malheureusement, il ne supportera ni son amour frustré ni le spectacle de l’autodestruction de Eunyoung pour échapper au désir des hommes qu’elle fuit désespérément depuis son agression.
Au début du film, Eunyoung rencontre une grosse caricaturale qui s’empiffre et dégoûte les passants, elle lui montre sa photo jeune et mince «avant», c’est l’antidote, la solution. Après le viol, Eunjoung va passer de la boulimie, engouffrant des kilos de hamburgers et lipides, à l’anorexie, s’épuisant à courir et se gavant de gelules amaigrissantes. Comme elle est devenue une clocharde qu’enfin plus personne ne remarque, pire, qu’on fuit, Eunyoung change de cap. C’est là où la démonstration est complexe et va gêner le plus le spectateur : le réalisateur veut montrer (sans doute) que la jeune fille meurtrie ne se contentera pas d’être repoussante, que les choses ne sont pas si simples… Car Eunjoung va entrer dans un conflit intérieur qui finira dans la folie, où elle veut à la fois séduire et ne pas séduire, retrouver sa beauté (outrée, elle se maquille comme une prostituée) tout en se débarrassant du désir des hommes et pourquoi pas carrément des hommes…
Beaucoup de sensibilité dans ce thème universel de la beauté mortifère, du culte de l’apparence, de la solitude de la star malgré elle. Psychologie féminine d’un siècle où manger est devenu le tabou ultime : des kilos servant à faire disparaître le corps, à le soustraire au désir de l'autre, gommer son corps, on sait que la boulimie et l’anorexie relèvent du même mécanisme psychique. La démonstration est un peu forcée, surtout à la fin, on est passé d’un récit moderne avec un brin d’humour à un conte allégorique coloré à la culture jeu vidéo où on tire sur tout ce qui bouge. Mais l’ensemble fonctionne et le film emporte l’adhésion.
Hommage au Japon
Hommage à Joe Hisaishi, compositeur de musiques de films du "Mecano de la générale" de Buster Keaton au film de Jiang Wen présenté demain soir "Le Soleil se lève aussi" en passant par les films de Takeshi Kitano et de Hanyao Miyazaki
Joe Hisaishi reçoit son trophée des mains du compositeur français Alexandre Desplats ("De battre mon coeur s'est arrêté", "Lust caution") en présence de l'ambassadeur du Japon en France ( à gauche) et du maire de Deauville (à droite)
Hommage au comédien Kôji Yakusho, acteur à carrière internationale de "Shall we dance?" de Masajuki Suo ou "Mémoires d'une geisha" de Rob Marshall à "Babel" d'Alejandro Innaritu
Kôji Yakusho entouré (à gauche) du directeur du festival, de l'ambassadeur du Japon en France et (à droite) du maire de Deauville
"Funuke show some love, you losers" de Yoshida Daïhachi (Japon)
/ compétition
Une actrice ratée aux allures de top model rentre dans son village après la mort de ses parents, elle y retrouve son frère, sa belle-soeur et sa jeune soeur qu'elle maltraite, ayant eu l'habitude de faire vivre sa famille au gré de ses caprices. Une vengeance et un secret lient la cruelle à sa petite soeur et à son demi-frère pour les menacer... Film tragico-burlesque, hommage au Manga (dont des flash-backs en noir et blanc plutôt réussis) où passée l'heure de film (qui en dure 2...), la cohérence des personnages se dissout pour créer des situations. Pas assez radical pour être un film-Manga, hyperstylisé mais trop théâtral, il y a des trouvailles et un brillant trio d'actrices. Impression mitigée...
Les meilleurs films passent souvent la nuit... C'est à 22h30 qu'on a programmé le choc de la journée : un film Philippin de Brillante MA. Mendosa intitulé en VO "Tirador" , soit "Slingshot" pour l'international.
Démarrant par une descente de police dans un bidonville de Manille, on est scotché dès la première image, aspiré, immergé dans des ruelles sombres où vit dans la pénombre toute une population à peine éclairée par l'intermittence de la lampe torche d'un homme qui les prévient "il va y avoir une descente de police!" Un long plan séquence où la caméra nous entraîne, nous plonge la tête la première dans cet immeuble, ce quartier populaire, au coeur de ces habitants vivant dans la plus grande précarité et dont pas mal d'hommes sont des dealers : on dirait que le spectateur devient la caméra en train de filmer si on peut résumer l'impression en deux mots. Rien que de très banal à Manille, les habitants regagnent à la hâte leurs logements misérables, appartements cagibis d'une extrême pauvreté, quand la police débarque, sorte de "Troupe d'élite" (ours d'or de Berlin cette année, d'ailleurs le film fait penser à certains films brésiliens se passant dans les favelas), policiers portant des bandanas blancs, des blousons et des mitraillettes, ils éjectent tous les hommes dans la rue et leur demandent de se déshabiller pour contrôler qu'ils ne cachent pas de la drogue sur eux.
En sortant du commissariat le lendemain, quelques hommes relâchés par l'intervention d'un homme politique le remercient, il leur répond de voter pour lui... Entre religion et politique, le quartier du bidonville est essoré, conditionné par les deux pouvoirs en place, survivant plus mal que bien, acheter un dentier, soigner un enfant malade, réparer une machine à laver, tout est trop cher, l'argent manquant toujours, omniprésent sujet de conversation. Le film se passe durant la semaine sainte et pendant la campagne municipale avec profusion de fêtes religieuses et d'"aides" en cash pour acheter les votes. Dans cette extraordinaire cohue, cette confusion assourdissante où on ne distingue plus un individu d'un autre mais une masse de pieds et de jambes, où un homme meurt d'un "accident" : il a été piétiné par la foule! , on suit la route de quelques voleurs allant racketter quelques riches passants dans le quartier d'affaires de Quiapo pour survivre.
C'est très difficile de raconter ce film où on est plus sidéré par l'ensemble que par le destin de quelques uns érigés en personnages centraux du film à suivre de plus près car tout nous touche et nous révolte, d'autant que les images sont aussi choc que le sujet : images sépia et blanches plus que noir et blanc et pourtant en couleur décolorée, passée, le jour surexposée, blanchie, tristes tropiques sans soleil avec des pluies chaudes, des ciels bas, des tongs aux pieds dans le sol terreux, images sublimes la nuit, la descente de police du début du film, on ne risque pas de l'oublier, à tous points de vue!
Démarrant par une descente de police dans un bidonville de Manille, on est scotché dès la première image, aspiré, immergé dans des ruelles sombres où vit dans la pénombre toute une population à peine éclairée par l'intermittence de la lampe torche d'un homme qui les prévient "il va y avoir une descente de police!" Un long plan séquence où la caméra nous entraîne, nous plonge la tête la première dans cet immeuble, ce quartier populaire, au coeur de ces habitants vivant dans la plus grande précarité et dont pas mal d'hommes sont des dealers : on dirait que le spectateur devient la caméra en train de filmer si on peut résumer l'impression en deux mots. Rien que de très banal à Manille, les habitants regagnent à la hâte leurs logements misérables, appartements cagibis d'une extrême pauvreté, quand la police débarque, sorte de "Troupe d'élite" (ours d'or de Berlin cette année, d'ailleurs le film fait penser à certains films brésiliens se passant dans les favelas), policiers portant des bandanas blancs, des blousons et des mitraillettes, ils éjectent tous les hommes dans la rue et leur demandent de se déshabiller pour contrôler qu'ils ne cachent pas de la drogue sur eux.
En sortant du commissariat le lendemain, quelques hommes relâchés par l'intervention d'un homme politique le remercient, il leur répond de voter pour lui... Entre religion et politique, le quartier du bidonville est essoré, conditionné par les deux pouvoirs en place, survivant plus mal que bien, acheter un dentier, soigner un enfant malade, réparer une machine à laver, tout est trop cher, l'argent manquant toujours, omniprésent sujet de conversation. Le film se passe durant la semaine sainte et pendant la campagne municipale avec profusion de fêtes religieuses et d'"aides" en cash pour acheter les votes. Dans cette extraordinaire cohue, cette confusion assourdissante où on ne distingue plus un individu d'un autre mais une masse de pieds et de jambes, où un homme meurt d'un "accident" : il a été piétiné par la foule! , on suit la route de quelques voleurs allant racketter quelques riches passants dans le quartier d'affaires de Quiapo pour survivre.
C'est très difficile de raconter ce film où on est plus sidéré par l'ensemble que par le destin de quelques uns érigés en personnages centraux du film à suivre de plus près car tout nous touche et nous révolte, d'autant que les images sont aussi choc que le sujet : images sépia et blanches plus que noir et blanc et pourtant en couleur décolorée, passée, le jour surexposée, blanchie, tristes tropiques sans soleil avec des pluies chaudes, des ciels bas, des tongs aux pieds dans le sol terreux, images sublimes la nuit, la descente de police du début du film, on ne risque pas de l'oublier, à tous points de vue!
D'après ce que j'ai pu lire, le cinéma Philippin est tourné en numérique avec de très faibles moyens, exporté dans les grands festivals, il n'a cependant pas conquis le public philippin sur place, même le dernier film de Mendoza plus grand public "John John" n'est pas resté deux jours à l'affiche (mais actuellement en salles en France)...
Pour les Deauvillais, ce film repasse à 9h00 dimanche 16 mars au cinéma du Casino et Manille vaut bien une messe!
trailer de "Tirador"/"Slingshot"
Mots-clés : Beautiful, Funuke, Tirador, Slingshot, Brillante Mendosa, Yoshida Daïhachi, Juhn Jaihong
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